Au Japon, une évolution notable se dessine dans les comportements affectifs des jeunes générations. Alors que le baiser a longtemps été considéré comme une démonstration courante d’affection et un rite de passage dans de nombreux pays, il semble devenir de plus en plus rare parmi les lycéens japonais. Une récente enquête de l’Association japonaise pour l’éducation sexuelle a mis en lumière que seuls 25 % des lycéens déclarent avoir échangé un baiser, soulignant un recul significatif par rapport aux décennies passées.
Les Chiffres Qui Parlent
Selon l’étude, menée auprès de 12 562 étudiants, la proportion de jeunes ayant déjà embrassé quelqu’un est en net recul depuis les années 2000. Cette tendance est particulièrement marquée chez les garçons : seuls 22,8 % affirment avoir déjà échangé un baiser, un nombre encore jamais observé aussi bas selon les archives du Mainichi Shimbun. En comparaison, ce chiffre était de 23,1 % en 1987. Les filles semblent un peu moins touchées par cette baisse : elles sont 27,5 % à avoir déjà embrassé, mais ce chiffre est en diminution de 13,5 points depuis 2017.
Les Facteurs Multiples de ce Déclin
De nombreux experts s’accordent à dire que cette diminution du contact bucco-buccal chez les jeunes Japonais n’est pas uniquement le résultat de la pandémie de Covid-19, bien que celle-ci ait joué un rôle significatif. Yusuke Hayashi, sociologue, explique que les fermetures d’écoles et les mesures de distanciation sociale ont indéniablement freiné les interactions physiques pendant cette période. Cependant, il note que le retrait des jeunes de ces comportements remonte à bien avant la crise sanitaire.
L’Emergence des « Herbivores »
Un autre facteur culturel pourrait expliquer cette tendance : la montée du phénomène des « herbivores », un terme inventé par la journaliste Maki Fukasawa pour décrire une génération de jeunes Japonais qui éprouvent peu d’appétit pour les relations physiques. Pour ces jeunes, les relations amoureuses et sexuelles peuvent être perçues comme « mendokusai », c’est-à-dire ennuyeuses ou problématiques. Cela se traduit par des statistiques révélant que parmi les moins de 18 ans, seulement 15 % des filles et 12 % des garçons ont déjà eu des relations sexuelles.
Une Sexualité Différente Mais Présente
Malgré le recul apparent de la pratique du baiser, les recherches de l’Association japonaise pour l’éducation sexuelle montrent que d’autres formes de sexualité sont en augmentation. La masturbation, par exemple, est devenue plus fréquente parmi les collégiens et les lycéens japonais, atteignant des niveaux records. « Ce comportement s’observe indépendamment de la présence ou non de partenaires sexuels et pourrait être influencé par une exposition accrue aux contenus érotiques dans les mangas et autres médias », explique Hayashi.
Les Implications pour l’Avenir
Cette tendance à délaisser les contacts physiques chez les jeunes inquiète non seulement les sociologues et éducateurs, mais aussi les autorités japonaises. Des initiatives publiques sont mises en place pour essayer d’inverser cette tendance, avec l’espoir que les jeunes renoueront avec des formes d’expression de l’affection plus traditionnelles.
En réponse à cette situation, des entreprises comme Tenga, connue pour ses jouets sexuels, innovent en proposant de nouveaux produits visant à encourager l’intimité. Leur plus récente initiative inclut la gamme Caressa, qui vise à faciliter les interactions physiques, et l’introduction de compléments alimentaires destinés à réduire les odeurs corporelles, afin de rendre les contacts peau à peau plus agréables. Ces efforts montrent bien la complexité et la diversité des approches nécessaires pour redéfinir les frontières de la sexualité chez les jeunes générations au Japon.