Au Japon, une tendance surprenante émerge concernant les habitudes romantiques des jeunes : l’échange de baisers est en chute libre. Selon une étude menée par l’Association japonaise pour l’éducation sexuelle, seulement un quart des lycéens admettent avoir embrassé quelqu’un sur la bouche. Ce phénomène semble être en contradiction avec les pratiques observées dans d’autres parties du monde.
Des chiffres en baisse
L’enquête, qui a interrogé 12.562 étudiants japonais, révèle une diminution constante du nombre de jeunes qui s’engagent dans ce type de geste affectueux, avec des différences notables entre garçons et filles. Seuls 22,8 % des garçons ont déclaré avoir échangé un baiser, comparé à 27,5 % des filles. Historiquement, les chiffres de 1987 indiquaient déjà une proportion basse, mais les récentes statistiques sont les plus basses jamais enregistrées.
Les raisons derrière cette tendance
Plusieurs facteurs semblent contribuer à ce recul. D’abord, l’impact durable de la pandémie de Covid-19 qui a restreint les interactions physiques en raison des fermetures d’écoles et des mesures de distanciation sociale. Yusuke Hayashi, sociologue, explique que cette période a exacerbé une tendance déjà présente avant la pandémie.
Par ailleurs, l’ère moderne du numérique offre de nombreuses alternatives aux interactions physiques traditionnelles. Les jeunes Japonais sont ainsi plus susceptibles d’investir leur énergie dans des interactions virtuelles, que ce soit via les réseaux sociaux ou les jeux en ligne, diminuant ainsi le besoin de contact physique direct.
Le phénomène des « herbivores »
Un terme souvent utilisé pour décrire certains jeunes Japonais est celui de « herbivores », inventé par la chroniqueuse Maki Fukasawa. Ces « herbivores » se caractérisent par une faible appétence pour les relations sexuelles ou physiques, considérant souvent celles-ci comme désagréables ou « ennuyeuses », terme traduit du japonais « mendokusai ».
Cette approche peut paraître déroutante pour des cultures où le contact physique est valorisé comme une étape normale du développement des relations amoureuses et sociales. Cependant, elle reflète bien l’évolution des normes sociales et relationnelles au Japon.
Changement des dynamiques sexuelles
Malgré la réduction des baisers, l’intérêt pour la sexualité ne diminue pas nécessairement. L’étude montre que le recours à la masturbation augmente parmi les jeunes, atteignant des niveaux records tant chez les garçons que chez les filles. Ceci pourrait être influencé par une plus grande exposition aux représentations sexuelles dans les médias, y compris les mangas et autres contenus numériques.
Ce phénomène souligne un passage des interactions sexuelles interpersonnelles à des comportements plus autodirigés, faisant émerger de nouvelles dimensions dans la sexualité des jeunes Japonais.
Les initiatives pour revitaliser les interactions
Face à cette évolution, les autorités japonaises tentent d’encourager les jeunes à renouer avec des formes plus traditionnelles de relations amoureuses et sexuelles. Des initiatives publiques et privées cherchent à inspirer un regain d’intérêt pour les contacts physiques. Par exemple, Tenga, une entreprise spécialisée dans les jouets sexuels, a élargi sa gamme pour inclure des produits qui pourraient stimuler le contact physique et faciliter des interactions plus intimes.
Néanmoins, il est important de se rappeler que l’évolution des pratiques et des normes relationnelles varie d’une culture à l’autre. Au Japon, il s’agit moins d’une crise que d’une transformation des modalités de vie affective et sexuelle, qui pourrait bien redéfinir l’avenir des relations intimes dans le pays.
Conclusion
Le recul de la pratique du baiser parmi les jeunes Japonais invite à une réflexion plus large sur les changements culturels et sociétaux majeurs qui influencent la jeunesse moderne. Entre pandémie, avancées technologiques et changements de mentalité, la redéfinition des interactions intimes au Japon offre une perspective fascinante sur la manière dont les relations humaines continuent d’évoluer au XXIe siècle.
